L’orthographe de l’émancipation : l’alternative souveraine

Conférence donnée au colloque Penser l’émancipation, université Paris-8 Saint-Denis, 13-16 septembre 2017

Introduction

     Le moment qu’il est convenu d’appeler « l’Émancipation des juifs » est contemporain en France d’une mise en place des conditions de réitération d’un débat sur la graphie du nom « juif ». Cette réitération persistante a pour effet de réactiver toujours de nouveau, tantôt explicitement, tantôt implicitement et, ce qui est remarquable, à la fois de manière interne et de manière externe, un débat qui porte, avec des priorités variables selon les époques considérées, sur 1° la nature fondamentale de l’identité collective des juifs (ce qui est évidemment la source d’un vertige infini) 2° la possibilité ou non de leur intégration ou assimilation (le choix des mots est déterminant et historiquement chargé) en tant que citoyens membres de la collectivité nationale, 3° les conditions de cette intégration ou assimilation, conditions qui ont pour caractéristique de ne pouvoir être remplies (c’est très précisément la figure kafkaïenne de l’atermoiement indéfini). À ces trois enjeux, historiquement premiers, s’en ajoute un quatrième, qui vient les recouper et les compliquer à partir d’un autre agenda. La critique de la pensée sioniste comme de l’arraisonnement des identités juives dans le projet colonial israélien passe en effet par une nécessaire remise en question de la manière dont il a fallu, pour réaliser cet arraisonnement, s’appuyer sur les formulations antérieures de ces identités. Cependant on s’empresse bien souvent d’accorder un privilège théorique à l’une ou à l’autre des catégories proposées, en oubliant de les interroger en elles-mêmes.

     La règle ortho-typographique (N. Catach) veut que l’on écrive, en français, les noms de gentilés (peuples, nations, nationalités, ethnies, et races1) avec la majuscule (ou capitale) initiale et les noms d’adeptes de religions avec la minuscule initiale (ou bas de casse). Le nom « juif » ou « Juif » a cette particularité de pouvoir désigner, en principe et selon les occurrences textuelles, soit un membre d’un peuple ou d’une nation, voire d’une ethnie ou d’une race, soit l’adepte d’une religion. Pour écrire correctement ce nom, il est donc nécessaire de savoir si on lui donne le sens d’un gentilé ou d’une religion. Inversement, il suffit de l’écrire pour être situé.e (parfois malgré soi) de tel ou tel côté d’une constellation idéologique bien sédimentée, voire pour risquer d’en dire plus que ce que l’on voudrait et s’assigner une place non entièrement pesée dans cette constellation. 

Lesquelles, bien qu’elles n’aient pas d’existence naturelle, comme nous le savons sans que ce savoir produise aucun effet, produisent, elles, des effets dans les sociétés qui en ont inventé le concept, comme nous le savons aussi; or les concepts ont une existence scripturaire avant même d’avoir une existence sociale, ce qui, quand bien même on n’aurait pas lu les démonstrations imparables de Colette Guillaumin, devrait suffire à établir que le racisme ne vient pas mécaniquement « d’en bas », n’est pas une production spontanée des gens sans éducation, comme on s’échine à nous le faire croire.

     Tout le monde en France, ou du moins la plupart des « écrivant.e.s », connaît la règle. Ou plutôt, nul n’est censé l’ignorer, tant est forte la « tendance française à l’hypercorrection » (Nina Catach). En revanche, on ne peut que constater une absence, à ma connaissance, totale de problématisation historique de cette règle : personne ne sait ni quand ni comment elle est née, mais surtout, personne ne s’en soucie. Pourtant, cette question, que j’appelle « la question ortho-typographique », permet d’en formaliser une autre, plus fondamentale, et qui porte sur la distinction catégorielle entre peuple et religion, distinction elle-même systématiquement mobilisée et peu, voire pas interrogée, du moins en France.

C’est donc à cette problématisation de la règle, et à l’interrogation de cette distinction, que je m’attacherai ici.

     Ce n’est pas un hasard si le moment où se fixe la règle suit immédiatement celui où les juifs français accèdent à l’égalité et à la qualité de citoyens. Même si elle n’a pas été conçue spécifiquement pour eux, la règle a des conséquences spécifiques sur la perception des juifs, et sera l’un des moyens, remarquablement économiques, permettant de discipliner et de normaliser les corps juifs. L’obligation d’avoir à choisir, à décider si « les j/Juifs » sont ceci ou cela, est inséparable de l’interrogation presque obsessionnelle qui porte sur les catégorisations que le 19ème siècle s’obsède à élaborer pour les ensembles humains. L’alternative intraitable posée par la règle reconduit indéfiniment une interrogation altérisante qui masque mal l’inquiète obsession de l’homogénéité supposée du corps national.    

     La remise en question des bienfaits de l’Émancipation a souvent été tributaire d’un agenda politique colonial et/ou réactionnaire2. En réfléchissant à la longévité de ce que j’appellerai « l’alternative souveraine » (i.e. à la nécessité pour les juifs de s’inscrire d’un côté ou de l’autre du partage entre peuple et religion), et aux conditions de son transfert ultérieur sur les autres minorités, au prix de déplacements sémantiques remarquablement économiques, et d’une fixation sur les couples notionnels issus de ou associés à ces déplacements (théologique/politique; public/privé) mais en réfléchissant aussi à la manière dont cette histoire peut (et doit, à mon avis) servir à mieux comprendre la situation qui est aujourd’hui celle des autres minorités en France, je voudrais me demander, d’un point de vue relevant de ce que Houria Bouteldja a appelé « l’amour révolutionnaire », ce que la critique de l’Émancipation peut apporter à une politique décoloniale et en quoi elle peut contribuer à nourrir de nouvelles alliances, à décrypter les impasses contemporaines et à désamorcer autant que faire se peut la réitération fragmentaire3, pour ainsi dire, que nous observons. Ce travail critique, je l’aborde ici et ailleurs à partir d’une réflexion sur les impasses de la règle ortho-typographique que j’étudie. J’élabore, ailleurs, une démarche délibérément axée sur les aspects « techniques » qui s’associent à l’appareil de règles qui gouverne l’écriture4 ; ici, j’en développe plutôt certains des attendus théoriques.

Je développe ailleurs.

Je renvoie notamment à l’excellent numéro de la revue Labyrinthe, intitulé « Des Juifs contre l’émancipation ».

Voir sur ce site l’article « Verbesserung der Juden. L’orthographe de l’émancipation ». Ces deux textes sont des aspects du travail en cours.

1° Écrire l’altérité – procédures de lisibilité

     L’historien Ronald Schechter5 invite à former un nouveau champ de recherches, l’hétérographie comparée, qu’il distingue de l’ »hétérologie » telle que la pense Michel de Certeau. Il s’agit, selon Schechter, de comparer les manières dont les « autres » sont écrits et représentés, par ceux dont ils sont les « autres », ceux qui les constituent comme tels, qui les altérisent donc, mais aussi par eux-mêmes dans leur perception d’êtres altérisés, dans leur rapport à ce qu’il perçoivent comme ce qui est attendu d’eux, à ce qu’ils attendraient, comme perception alternative, du « même » qui les fait « autres » et les maintient dans cette altérité – ou ne leur laisse éventuellement que le choix d’être, soit entièrement autres, soit entièrement mêmes (ce qui, dans les deux cas, relève du fantasme). Il en est ainsi, en Europe au 18ème siècle, des juifs, des femmes, des musulmans, des Noirs d’Afrique, des Indiens d’Amérique, mais aussi, différemment, des « enfants sauvages », ces « homines feri » qui sont les préférés parmi tous ces sauvages de l’Europe. Dans le cadre de cette réflexion, R. Schechter écrit :

Obstinate Hebrews. Representations of Jews in France, 1715-1815 (U. of California Press, 2003

L’impression que l’on risque d’avoir, en lisant les nombreux ouvrages consacrés au thème de l’Autre, est qu’un « Autre » vaut autant que l’autre. De fait, la tendance à écrire « l’Autre » en capitale, une convention qu’il m’arrive de suivre moi-même, suggère une nature invariante ou éternelle d’une catégorie formelle, platonicienne d’altérité, à laquelle tous les exemples particuliers renvoient, en dernier recours. Paradoxalement, cependant, cette opération d’universalisation encourt le risque de répéter précisément l’erreur d’abstraction – et l’échec qui s’ensuit à reconnaître l’incommensurabilité – qui a été reprochée aux Lumières. Pourtant, outre tout échec à apprécier la spécificité des individus ou des groupes singuliers le présupposé que tous les « autres » sont perçus (ou ne sont pas perçus), représentés et construits de la même manière est, je crois, historiquement non exacte6.

p. 238, je souligne.

       Je voudrais être attentive à la leçon de Schechter et ne pas courir le risque de participer à l’universalisation de la catégorie d’Autre. Je voudrais que mon intérêt pour l’une des manière d’écrire un « autre » spécifique, qui est aussi l’une des procédures par lesquelles son altérisation n’a cessé d’être reconduite en même temps que l’injonction, tantôt violente, tantôt caressante, d’avoir à renoncer à son altérité7, que cet intérêt donc n’entre pas dans les stratégies infiniment variées de cette universalisation. Et pourtant, je me rends bien compte que mon analyse d’un aspect très spécifique et très technique de ces procédures, qui est la règle ortho-typographique dans sa singularité même, fait apparaître un schéma de réitération de l’altérisation et de reconduction des empêchements (qui sont des empêchements de diverses nature, mais en premier lieu des empêchement de penser), des injonctions paradoxales et des atermoiements indéfinis.

       Comment l’Europe, et singulièrement la France, aborde-t-elle ses « Autres », ceux qu’elle comprend et constitue ainsi, précisément, en « autres » ? La réponse à cette question suppose naturellement, à la fois en amont et en aval (i.e. comme préalable à et comme effet de cette constitution), de comprendre comment elle construit son « soi », son même – son soi-même. La diversité dont on ne cesse de nous rappeler de manière incantatoire qu’elle compose le soi-même européen, français, comment cette diversité est-elle subsumée sous une identité qui est une identité « propre », pour un soi-même conçu, construit, comme homogène, contre toute évidence, parfois ? Et comment, à partir de là, à moins que ce ne soit pour en arriver là, par quelles procédures sont construits ses « Autres » ? Disons : ses minorités, en reprenant un terme associé aux impasses de l’État-nation au vingtième siècle, mais un terme dont je pense nous n’avons pas épuisé les ressources. Comment l’Europe et la France justifient-elles la permanence des hétérogénéités en elles tout en maintenant leur croyance en leur propre homogénéité, croyance qui leur permet ou leur enjoint de reconduire les procédures d’hétérogénéisation ? Pour le dire plus simplement, quelles sont les catégories qui permettent de produire de l’homogène d’un côté et de l’hétérogène de l’autre ? L’une de ces catégories est celle de la blanchité, dont l’indispensable problématisation ne fait que commencer en France. La blanchité est en quelque sorte le cadre (qui ne peut être nommé, j’y reviendrai) sur lequel se détachent les opérations de configuration, de reconfiguration, de partages, repartages et départages, de ces catégories, au terme desquelles elles deviennent opérantes dans la réalité. Par exemple, un livre comme How Jews became White Folks and what that says about Race in America, de Karen Brodkin, montre comment « les juif.ves » aux États-Unis ont été intégré.es à la blanchité, en analysant les procédures par lesquelles ils.elles ont été inclu.ses dans les quartiers de la moyenne bourgeoisie suburbaine dans les années 1950. Parallèlement, certes, l’antisémitisme de la bourgeoisie WASP perdurait, mais l’intégration économique et sociale des juif.ves leur donnait accès aux privilèges associés à la blanchité.

Les opérations de catégorisation qui intègrent et excluent, d’une part, et édictent des injonctions simultanées et contradictoires, de l’autre, il convient donc de les recenser dans leur technicité même. Il convient d’en montrer la dimension temporelle: elles se réitèrent, se contredisent, se transforment. Elles s’archivent dans les corps, dans les discours, dans les groupes qu’elles visent ou constituent. En tant qu’archives, elles contiennent des enseignements sur les sorts que constituent les catégories, d’où nous pouvons tirer des méthodes de désorcèlement8.

Pour commencer par ce qui apparaîtra peut-être comme une évidence, le passage d’une pensée des catégories à une perception de leur évidence telle qu’elle semble se donner à lire sur les corps se fait, comment en irait-il autrement, par le langage, bien sûr mais aussi par l’écriture. On peut dire, inversement, que pour que des catégories accèdent à une forme d’existence, il faut qu’elles s’incarnent, qu’elles prennent corps, qu’elles se matérialisent. En d’autres termes : les opérations dont je parle sont des opérations de l’esprit sur les corps par le truchement du véhicule privilégié de l’incarnation qu’est l’écriture. Car nous qui vivons en terre chrétienne, nous savons que pour être opérant, l’esprit doit s’incarner, notamment par le truchement de la parole et de l’écriture. Et nous qui vivons en terre de France, nous savons que l’écriture droite a ses règles dont l’observance témoigne d’une bonne naissance, d’une bonne formation et d’une bonne appartenance. Mais nous qui avons lu Wittgenstein et Foucault, nous savons aussi que les règles qui gouvernent les jeux du langage ne servent pas seulement à délimiter les contours d’un discours acceptable, mais qu’elles ont une fécondité irréductible. Et nous qui bien sûr avons toutes et tous lu Colette Guillaumin, nous savons qu’aucun « autre » n’est jamais tel intrinsèquement et que notre rapport à celle ou celui que nous percevons, éventuellement, comme autre, n’a rien de spontané ; qu’il n’est pas plus « naturel » de le rejeter que de l’accepter, mais que cela découle de construction (ce qu’on appelle ainsi) qui sont parfois délibérées et parfois non, parfois d’ »opérations sans sujet » et parfois dont l’intention est ailleurs – par exemple dans un inconscient qu’on qualifiera, avec Nicole Loraux et avec autant de précautions qu’elle, de « politique ».

Je développe dans la recherche en cours, et dans un texte à paraître.

       En d’autres termes, nous savons que l’un des tours les plus remarquables du racisme consiste à se faire passer pour une attitude spontanée, pour une approche par défaut, l’expression de la méfiance bien compréhensible et néanmoins condamnable des braves gens mal dégrossis ; alors qu’il n’y a peut-être pas de phénomène plus spécifique à ce que nous appelons racisme que l’insistance sur le respect des règles de l’orthographe, j’espère parvenir à le montrer ici. Un respect qui passe plutôt pour l’une des marques des gens bien élevés qui, naturellement, ne sont jamais racistes.

L’opération dont je parle n’est pas sans intention, et il y a bien des sujets, mais l’intention n’est pas adéquate aux effets ; autrement dit, les décisions qui conduisent à la règle (majuscule pour les gentilés, minuscule pour les religions) semblent n’avoir pas de visée systématique, mais au contraire relever d’agendas distincts et spécifiques, non liés entre eux, du moins, encore une fois, dans l’intention délibérée. Ainsi, les décisions de l’Académie française qui portent sur les gentilés ne sont pas nécessairement, (apparemment) corollaires de celles qui portent sur les religions. Ce n’est qu’a posteriori qu’on peut y voir un effet de système, une mise en couple, pour ainsi dire. En outre, les effets singuliers de ces décisions sur la (ou les) « portée(s) du nom juif » pour ainsi dire encore, sont « accidentels », incidents, ils résultent d’un effet de clinamen, d’une rencontre opportuniste, (fût-elle, de notre point de vue, inopportune) et d’une conjonction planétaire. Il n’y a pas là d’outrance, car cette conjonction – les termes et conditions dans lesquelles les juifs ont été « émancipés » entre la Révolution française et la politique consistoriale de Napoléon – ont influé sur les destinées des juifs du monde entier9. Or ces décisions de l’Académie française sont rigoureusement contemporaines des transformations de statut des juifs en France, et des débats ininterrompus, depuis le texte de Dohm dont je parlais (comme l’a analysé Amnon Raz-Krakotzkin) et jusqu’à Schlomo Sand, sur la question de savoir si les j/Juifs étaient les membres d’une nation, d’un peuple, voire d’une race, d’un côté, ou les adeptes d’une religion, de l’autre. 

Et il faut aller jusqu’à dire qu’elles influent aujourd’hui en France sur les autres minorités, et en particulier sur la minorité musulmane, qui est celle dont la situation ressemble structurellement le plus à la minorité juive d’autrefois (cet « autrefois » restant à définir: sans doute comme une sorte de feuilletage de différentes époques, de la fin du dix-huitième siècle au milieu du vingtième).

2° L’alternative peuple-religion

Je terminerai rapidement cet exposé sur une série de questions. Pourquoi l’opposition peuple/religion est-elle encore et toujours mobilisée avec autant de candeur et de foi dans sa supposée naturalité, dans sa prétendue évidence, dans les discours sur les j/Juifs depuis la fin du dix-huitième siècle, en France ? Pourquoi, en français, la règle qui permet d’instancier cette prétendue évidence n’est-elle jamais interrogée et pourquoi est-elle au contraire systématiquement invoquée d’une manière qui par moments semble presque relever de la superstition10? Pourquoi les critiques du sionisme persistent-elles à s’appuyer sur cette distinction qui, comme l’a montré Amnon Raz-Krakotzkin a été reprise par le sionisme, pour en faire son miel, à la construction européenne de l’identité juive, une construction dont dépendent toutes les impasses des identités juives depuis deux siècles et qui n’en est pas moins reprise par les j/Juifs comme par les non-juifs pour désigner la supposée spécificité juive et se placer de tel ou tel côté d’un échiquier instable mais obstinément rivé à ces termes ? Mais surtout, une construction qui repose sur des distinctions conceptuelles, sur des couples notionnels et des dichotomies qui ont organisé la sécularisation à la française, une approche qui s’enracine dans l’histoire singulière française de séparation de l’Église et de l’État, qui continue à gouverner la manière dont nous pensons les identités et sert aujourd’hui à rejeter à leur tour les musulmans du côté d’une injonction paradoxale à l’intégration (nouveau nom de l’assimilation), dont les conditions sont par nature impossibles à remplir.  La règle ortho-typographique, dans son formalisme et son extériorité, fonctionne à la fois comme symptôme et comme opérateur de production de cette candeur, ou si on préfère, de l’évidence de ces oppositions. En d’autres termes, la naturalisation (le « devenir-allant-de-soi ») des binarismes (peuple-religion ; mais tout aussi bien culture-religion ou théologique-politique) altérisants11 emprunte des voies qui non seulement sont destinées à donner à lire et à voir l’évidence de ces binarismes, mais sont elles-mêmes parfaitement lisibles. Et c’est ainsi, c’est du moins mon hypothèse, que d’un siècle à l’autre, et d’une altérité à l’autre, par le truchement de catégories anthropologiques à l’autorité inamovible, au moins en apparence, la solidité d’une conception de la nation renouvelle ses procédures d’exclusion de son propre, de son corps qui n’est jamais trop polymorphe, mais qui souffre encore toujours d’allergie, ou si l’on préfère, d’une intolérance qui a ceci de particulier qu’elle peut se fixer sur des objets indéfiniment variables, ce qui tend à indiquer qu’elle relève de l’hystérie.

Texte à venir sur ce thème.

Gil Anidjar a analysé l’axe race-religion dans Sémites. Religion, race et politique en Occident chrétien, paru en 2016 aux éditions Le Bord de l’eau (Stanford University Press, 2008). Il a étudié l’axe théologico-politique dans The Jew, the Arab. A History of the Enemy, Stanford University Press, 2003.